
Quand la personne, bébé, enfant, ado, adulte, supporte mal ou même refuse de se laver, comment faire ? Voici des petites (grandes) idées qu’ont trouvées certains d’entre nous pour rendre possible la toilette, et en faire un moment plaisant. Et toi, tu ferais comment ?
Associer les parents, même absents :
- Reprendre « la méthode du parent » (pour l’habillage, la toilette, les poux…) : « elle faisait comment ta mère ? » ; ou on demande directement au parent (devant l’enfant) « comment on doit faire » : dans les deux cas, on reprend « la méthode » parentale. RECITS : « Sabrina et les pediculus », Le Fil du récit n°5
- En cas de conflit avec le parent (vêtements négligés, adulte handicapé vêtu en « bébé »…), on propose au parent d’aller faire les courses ensemble (avec l’enfant) ; parfois il faudra préciser que c’est le parent qui décidera des achats ; ou bien on peut prétexter une sortie commune « loisirs » pour éviter de braquer le parent RECITS : « Les professionnels, les parents et leur enfant handicapé », revue VST n°115, 2012
- Laisser au parent le soin de laver les vêtements, ou reprendre la lessive de la mère (odeur des produits de la maison…)
En internat, en crèche etc. :
- Associer la lingère à l’accompagnement, ou à l’inverse, proposer à la personne d’aider la lingère, d’aller voir comment elle fait… (Mecs, foyers...)
- « Jacques a dit…» (pour la douche, l’habillage…) pour éviter de les toucher et pour qu’ils se lavent partout : enfants en Mecs, psychotiques…
- Variante : « Jacques a dit » inversé (personnes handicapées physiques…) : je fais semblant de me laver en suivant les ordres de l’enfant
- L’enfant se lave seul, et l’éducateur annonce que quand il reviendra, il devra être entièrement recouvert de mousse ; l’enfant appelle l’éducateur quand il est « tout blanc » (de mousse !) (Mecs, personnes handicapée… : autonomie, pudeur…)
- Laisser la personne dans la douche, et faire son lit pendant ce temps (handicap)
- Transformer la toilette (l’épouillage…) en salon de coiffure « classe »… (langage châtié, revues de mode…) : adolescents, adultes handicapés…
- Inventer ou utiliser une chanson pour le brossage des dents, etc. Petits enfants, enfants placés, enfants psychotiques ou autistes…
- L’éducateur apporte sa brosse et se brosse aux côtés de l’enfant Petits enfants, enfants placés,
- Laver le visage, les dents, devant un miroir (polyhandicap, personnes âgées, psychotiques) : échanges de regards, de gestes etc. dans le miroir
- Toilette en miroir (mime) : je montre comment faire en me « lavant » moi-même (handicap, psychose) : RECITS : « jeux de miroir » dans Petites histoires de grands moments éducatifs (l’éducatrice, se trouvant violente d’imposer la douche à un jeune psychotique, se met à mimer la toilette : le jeu du miroir et le mime sont intéressants avec ce public ! Voir rubrique Jeux) Polyhandicap : « Je pratique souvent le jeu de la toilette en miroir avec Mélanie (Jeune femme polyhandicapée). Je mime la toilette en nommant les différentes parties du corps. Elle reproduit alors mes gestes pour se laver, ce qui l’amuse beaucoup et la rassure. » Frédérique, éducatrice spécialisée
- prêter son téléphone pour que la personne (enfant, adolescent, adulte…) écoute sa musique pendant sa douche…
- Toilette chantée : mettre de la musique, chanter soi-même, inventer des paroles spéciales pour la personne,
- comptines adaptées à la toilette: « La fourmi m’a piqué la main » (pour moduler l’agression que représente le toucher : petits enfants, autistes, personnes handicapées…); « pirouette cacahuète » etc. (parties du corps) ; avec prénom de la personne et d’autres : collègues, papa… dans la chanson : voir récit » de Claude, Petites histoires de grands moments éducatifs, p. 36 : Christophe, adulte non-voyant, vit très mal d’habitude la toilette, Claude lui chante « pirouette cacahuète » pendant la douche, en insérant le nom de collègues dans les paroles, il est détendu, attend le prochain nom… (Claude s’est inspirée du récit de Fortuna, « Au détour d’une chanson, ton prénom te fait vivre », p. 34 du même livre)
- Avec les bébés : Mathias est un petit garçon de 12 mois pour qui le change est très compliqué car il est source d’angoisse. Un mercredi, une fois les goûters terminés, l’auxiliaire de puériculture s’approche de Mathias et l’invite à venir avec elle : « Tu viens, on va changer la couche ». Elle le prend dans ses bras et se dirige vers la salle de bain. Lorsqu’elle le dépose sur la table à langer, il se met à pleurer. D’une voix douce, elle tente de le rassurer : elle lui explique qu’elle va simplement lui changer la couche et qu’ensuite, il pourra retourner jouer. Pourtant, Mathias continue de pleurer, se débat, crie. Elle procède au change en le maintenant sur la table, le rhabille rapidement, puis le ramène en section. Petit à petit, il se calme. Plus tard, je remarque que Mathias a fait une selle. Je propose à l’auxiliaire de le changer. Elle accepte et me prévient : « Attention, il va pleurer pendant le change, tu vas voir. » J’acquiesce, prends Mathias dans mes bras et l’emmène à la salle de bain. Comme prévu, dès que je le dépose sur la table à langer, il pleure. Je verbalise mes gestes : « Je vais te changer la couche, tout va bien. » Mais ses sanglots persistent. J’essaie de le rassurer, de lui expliquer qu’il est en sécurité mais rien n’y fait. Sans trop réfléchir, je commence à fredonner une comptine : « Ainsi font, font, font les petites marionnettes… » et j’accompagne mes paroles de gestes, mimant les marionnettes avec mes mains. Mathias, avec ses yeux remplis de larmes, me regarde. Peu à peu, il se calme. Je continue de chanter, et à ma grande surprise, il imite mes gestes, secoue ses mains, applaudit, puis se met à rire. Je termine le change en chantant. De retour en section, l’auxiliaire, intriguée, me dit : « Je suis étonnée qu’il n’ait pas pleuré pendant le change. » Je prends alors l’habitude de chanter cette comptine tout en mimant les marionnettes à chaque change afin d’instaurer un rituel avec Mathias. Je remarque que lorsque que j’oublie de lui chanter la comptine, Mathias me regarde et commence à faire lui-même les gestes avec ses mains comme pour me signifier que j’ai oublié. Quelques semaines plus tard, après une longue période en centre de formation, je retrouve la crèche et les enfants qui ont bien grandi. Lors d’un change du matin, je prends Mathias dans mes bras et l’emmène dans la salle de bain. Je le pose sur la table à langer et commence à le déshabiller. Je remarque bien qu’il me regarde droit dans les yeux comme s’il attendait quelque chose de ma part. Je lui parle : « Alors, comment s’est passé ton week-end ? Tu as beaucoup grandi depuis la dernière fois ! ». Mathias ne réagit pas, mais il continue de me fixer. Puis il commence à agiter ses mains. D’un coup, je comprends… Je souris et lui dis en riant : « Ah, c’est ça que tu veux ! » puis je commence à chanter “Ainsi font font font les petites marionnettes” tout en mimant les marionnettes. Mathias sourit de plus belle et éclate de rire. A ce moment-là, j’ai un réel sentiment de fierté et d’accomplissement car j’ai réussi à accompagner cet enfant et à transformer un moment d’angoisse en instant de plaisir. Cette expérience me confirme qu’au-delà des mots, il existe mille et une façons de communiquer avec les enfants. Par cette comptine et ces gestes,je me rends compte que j’ai pu développer avec lui un mode de communication qui l’apaise. Ce jour-là, je prends pleinement conscience que la chanson, le geste et la bienveillance peuvent être de puissants outils pour accompagner les enfants dans leur développement et leur bien-être. J’ai partagé mes observations concernant le change de Mathias avec l’équipe. Je leur ai expliqué que j’avais instauré un rituel avec lui en chantant une comptine à chaque change. Les professionnelles ont accueilli mon initiative avec enthousiasme, me félicitant pour cette approche apaisante et ludique. Convaincues de son efficacité, elles ont décidé d’adopter cette méthode. Depuis, il m’arrive d’entendre les professionnelles chanter des comptines avec les enfants dans la salle de change, ce qui me conforte dans l’idée que ce petit rituel a trouvé sa place dans leurs pratiques. Louane, Educatrice de jeunes enfants stagiaire (l’équipe parlera de cet évènement à la famille du petit !)
- Annoncer nos gestes quand on va laver, demander l’accord de la personne avant de la toucher (bébés : cf. pédagogie Loczy ; personnes âgées, handicapées physiques, psychotiques, mal-voyantes…)
- Annoncer à la personne (de façon ludique, théâtralisée) qu’on ne sait pas faire sa toilette, lui demander comment on fait… (jeu de places) ; dire qu’on a peur de mal faire, que c’est difficile pour nous (« message-je ») : personnes âgées, handicapées, psychotiques… Exemple : J’ai travaillé dans un EAM, établissement d’accueil médicalisé pour adultes en situation de handicap psychique et/ou mental. Je suis toujours en études pour obtenir mon diplôme d’état d’éducateur spécialisé. Mes débuts se passe bien, je rencontre les personnes habitant sur le pavillon sur lequel je suis positionné pour l’été.
Mon deuxième jour, je dois réaliser la douche d’un petit monsieur. Il existe tout un protocole de soin, tout un schéma à suivre. Le scénario de la douche doit commencer à 18h, et très vite je sort du script. A 18h, il ne voulait pas prendre sa douche, voulant terminer son activité. Je le laisse faire, nous partons vers 18h30 dans sa salle de bain. Je le laisse se déshabiller, restant dans sa chambre, préparant le pyjama qu’il me décrit. Je suis mal à l’aise en entrant, je vais voir la personne que j’accompagne dans son plus simple appareil.
Instinctivement je lui dit : « C’est ta douche, guide moi. » Tout en lui avouant que je suis gêné.
Nous parlons alors de la pluie et du beau temps, et je le laisse me guider dans son accompagnement. Hugo, (éducateur stagiaire) - Le détour par un changement de places (cf. recadrage et jeu de places) : A un enfant de trois ans qui fait des crises à chaque fois qu’on veut lui faire prendre la douche, la grand-mère demande de l’aide : elle explique qu’elle doit s’occuper d’une petite fille qui a du mal à accepter la douche, elle demande à l’enfant son avis, comment elle doit faire. L’enfant lui explique très précisément les gestes à faire et à ne pas faire (par exemple : mettre la pomme à telle hauteur, laisser l’enfant régler la température, etc.) L’enfant prendra sa douche sans difficulté, en appliquant ses explications…
- Laver le poupon, une marionnette (improvisée : faire du gant une marionnette etc…) à la place de la personne, lui parler… (petits enfants, psychotiques…)
- Parler à la partie du corps qu’on doit laver, soigner (petits enfants, psychose…)
- S’adresser au vêtement que la personne ne veut pas quitter ou mettre (petits enfants, enfants et adultes psychotiques) ; voir RECITS « La chemise verte » dans Petites histoires de grands moments éducatifs, p. 157

Adultes en insertion qui « sentent mauvais », ne veulent pas se laver… :
- proposer une sortie « classe » (restaurant, théâtre…) ou en lien avec les centres d’intérêt de la personne RECITS : « Rêve d’envol » dans Le Fil du Récit n°5 : Louis, ancien SDF, refuse de se laver dans l’institution ; on lui propose une sortie en rapport avec sa grande passion – les avions) ; il accepte, motivé par l’objet de la sortie, et accepte aussi de se laver pour l’occasion ; il acceptera de se laver régulièrement…
- inviter des personnes extérieures, des enfants… cf. Deligny : Les vagabonds efficaces : Il invite des filles dans un foyer pour adolescents qui ne se lavent guère…
- Proposer dans la chambre de la personne qui refuse de faire le ménage un animal, une plante qui a « besoin d’air » (en rapport avec les centres d’intérêt de la personne) voir : Ménage et logement
- On fait un atelier fabrication de savon : les personnes qui résistaient à se laver peuvent dire : « c’est mon savon, je me lave avec mon savon »
Et toi ? Qu’as-tu inventé dans ces cas là ?