Problème : deux jeunes commencent à s’insulter, la tension monte…
Un matin pluvieux où la pluie martèle le béton comme l’ambiance maussade qui envahit nos esprits. Il y a des jours où on n’a pas envie de se lever. J’ai une intuition négative. Ce mardi matin en fait partie. Dès mon réveil je sens que cette journée va être sous tension.
Premier lever des jeunes dans 5 minutes, que va-t-il se passer ? Mon pressentiment va-t-il se confirmer ?
Et bien non, absolument pas. Pas un problème, pas un cri, pas une crise : une matinée comme on les adore. Voilà un réveil qui me donne la pêche, le sourire et c’est sûrement un détail indispensable pour comprendre la suite de notre histoire.
16h30, les adolescents rentrent du collège, direction le pavillon pour le goûter. Je suis retenu dans le bureau de la secrétaire pour quelques papiers. Une fois toute la paperasse administrative réglée, je me dirige vers le pavillon.
A peine la porte ouverte, j’entends des cris, des insultes… que je ne connaissais même pas. Le bruit ne fait qu’augmenter. La tension est palpable. Finalement, mon intuition de ce matin était-elle la bonne ?
Je pars vers la cuisine où la bataille fait rage. Sam et David sont nez à nez prêts à se découdre. Mon humeur est bien trop bonne pour me laisser monter en tension. Je rentre dans la cuisine sans un mot, en me dirigeant vers le frigo.
« Va te faire bip, espèce de bip de ta race !! » S’écrit nerveusement Sam le poète.
« Mais tu parles à qui sale bip, ta mère la bip, tu veux que je te casse la bouche, sale bip !! » lui répond aussi sec, David le romantique.
Moi, pendant ce temps là, contrairement à mes habitudes, je ne bronche pas. J’ouvre le frigo, prends du lait et le beurre, attrape la baguette et m’assois à la table juste devant les apprentis boxeurs. Les deux garçons semblent très surpris par ma non-intervention. Ils me regardent en silence quelques minutes, avant de reprendre leur petit jeu.
« Sale bip, espèce de bip !! »
« Va te faire bip, bip par ta mère !! »
La tension est à son comble, je sens qu’à tout moment la violence verbale peut devenir physique. Il faut que je trouve un moyen de mettre fin à ce conflit. Discrètement, je rapproche le bol du bord de la table, je me lève pour prendre la confiture et évidemment le bol tombe au sol dans un grand fracas, se brisant en mille morceaux.
« Sale bip !! Bip de ta mère !! Va te faire bip !! Espèce de bip de ta mère !! » Criais-je en direction du bol.
Les deux adolescents s’arrêtent net, me regardent comme le plus grand aliéné de la planète et me disent en chœur :
« T’as vraiment un problème Hugo, faut pas parler comme ça ! »
Ils partirent tous les deux dans leur chambre ; je ne les ai plus entendus de la soirée.
Hugo, Educateur spécialisé
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